Saisie d’un renvoi préjudiciel par la Curtea de Appel Alba iulia (Roumanie), la Cour de justice de l’Union européenne a, notamment, interprété, le 13 juin dernier, les articles 6 TUE et 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (Florescu, aff. C-258/14). Dans l’affaire au principal, les requérants exerçaient la profession de magistrats en Roumanie. Après leur admission dans la magistrature, ils ont conclu, à titre individuel, des contrats de travail à durée indéterminée pour des postes d’enseignants pourvus par voie de concours. En 2009, ils ont fait valoir leurs droits à la retraite de leur fonction de magistrat et ils ont pu, conformément à la loi, cumuler leur pension de retraite avec les revenus tirés de leur activité d’enseignement. A la suite de l’adoption d’une loi interdisant un tel cumul, en 2010, ils ont opté pour la suspension du paiement de leur pension, avant d’introduire un recours tendant à l’annulation des décisions de suspension des pensions les concernant. Après le rejet de ce recours, ils ont formé un pourvoi devant la juridiction de renvoi. Saisie dans ce contexte, cette dernière a interrogé la Cour sur le point de savoir, notamment, si les articles 6 TUE et 17 de la Charte doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une législation nationale qui prévoit l’interdiction de cumuler la pension nette de retraite dans le secteur public avec les revenus tirés d’activités exercées auprès d’institutions publiques si le niveau de celle-ci dépasse un certain seuil. Tout d’abord, la Cour estime que le protocole d’accord entre la Communauté européenne et la Roumanie de 2009 constitue la concrétisation d’un engagement entre l’Union européenne et un Etat membre sur un programme économique en contrepartie d’un concours financier de l’Union qui puise son fondement juridique dans l’article 143 TFUE. Partant, celui-ci constitue un acte pris par une institution de l’Union. Ensuite, selon la Cour, le protocole d’accord n’impose pas l’adoption d’une législation nationale qui prévoit l’interdiction de cumuler la pension nette de retraite dans le secteur public avec les revenus tirés d’activités exercées auprès d’institutions publiques si celle-ci dépasse un certain seuil. Enfin, la Cour estime que le protocole d’accord est suffisamment détaillé et précis pour permettre de considérer que l’interdiction en cause vise à mettre en œuvre le droit de l’Union, au sens de l’article 51 §1 de la Charte et rentre donc dans le champ d’application de cette dernière. La Cour rappelle que le droit de propriété ne présente pas un caractère absolu et son exercice peut faire l’objet de restriction. En vertu de la Charte, une telle limitation doit être prévue par la loi et respecter le contenu essentiel desdits droits et libertés. En outre, la législation nationale ne fait pas porter sur les personnes concernées par l’interdiction dudit cumul une charge disproportionnée et excessive et, dès lors, elle est apte à réaliser l’objectif d’intérêt général poursuivi et est nécessaire pour atteindre ledit objectif. Partant, selon la Cour, les articles 6 TUE et 17 de la Charte des droits fondamentaux doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une législation nationale telle que celle en cause au principal. (JJ)