Saisie de 2 renvois préjudiciels par le Tribunale di Santa Maria Capua Vetere (Italie), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 5 avril dernier, l’article 50 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne relatif au droit à ne pas être jugé ou puni pénalement 2 fois pour une même infraction (Orsi et Baldetti, aff. jointes C-217/15 et C-350/15). Dans l’affaire au principal, les représentants légaux de 2 sociétés italiennes ont été poursuivis pénalement pour avoir omis de verser la TVA due. Avant l’engagement des poursuites pénales à leur encontre, l’administration fiscale italienne a recouvré les montants de TVA dus et infligé des sanctions fiscales pécuniaires aux sociétés en cause. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si l’article 50 de la Charte et l’article 4 du Protocole n°7 à la Convention européenne des droits de l’homme s’opposent à une réglementation nationale qui permet de diligenter des poursuites pénales pour omission de verser la TVA, après l’infliction d’une sanction fiscale définitive pour les mêmes faits. La Cour rappelle, tout d’abord, que même si les droits fondamentaux reconnus par la Convention européenne des droits de l’homme font partie du droit de l’Union européenne, cette Convention ne constitue pas, tant que l’Union n’y a pas adhéré, un instrument juridique formellement intégré à l’ordre juridique de l’Union. Elle n’examine donc la question qu’au regard de la Charte. La Cour constate que les sanctions fiscales et les poursuites pénales nationales concernées constituent une mise en œuvre du droit de l’Union et relèvent de ce fait du champ d’application de la Charte. Elle ajoute, ensuite, que l’application du principe non bis in idem, garanti par la Charte, présuppose que la même personne fasse l’objet des sanctions fiscales et des poursuites pénales considérées. Ce principe ne peut pas être méconnu lorsque la même personne n’a pas été sanctionnée plus d’une fois pour un même comportement illicite. En l’espèce, la Cour relève que les sanctions fiscales ont été infligées à 2 sociétés ayant la personnalité morale alors que les procédures pénales visent des personnes physiques. Ainsi, elle estime que ces sanctions et ces poursuites concernent des personnes distinctes de telle sorte que la condition d’application précitée du principe non bis in idem semble faire défaut, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. En outre, elle précise que la circonstance selon laquelle les personnes sont poursuivies pénalement pour des faits commis en tant que représentants légaux des sociétés sanctionnées fiscalement n’est pas susceptible de remettre en cause cette conclusion. La Cour relève, enfin, que son interprétation de l’article 50 de la Charte est conforme au niveau garanti par la Convention européenne des droits de l’homme qui prévoit un droit équivalent. Partant, elle conclut que le droit de l’Union ne s’oppose pas à une législation telle que celle en cause au principal lorsque les sanctions fiscales ont été infligées à une société ayant la personnalité morale alors que les poursuites pénales visent des personnes physiques. (MS)