Saisie d’une requête dirigée contre l’Autriche, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 17 janvier dernier, les articles 3 et 4 de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, à l’interdiction de la torture et à l’interdiction de l’esclavage et du travail forcé (J et autres c. Autriche, requête n°58216/12 – disponible uniquement en anglais). Les requérantes, ressortissantes philippines, avaient travaillé aux Emirats Arabes Unis et alléguaient que leurs employeurs leur avaient confisqué leurs passeports et les avaient exploitées. Elles affirmaient que ce traitement avait continué durant un court séjour à Vienne. A la suite d’une plainte déposée par les requérantes contre leurs employeurs à Vienne, les autorités autrichiennes se sont déclarées incompétentes pour examiner les infractions alléguées commises à l’étranger et, après une enquête sur les infractions commises en Autriche, ont décidé d’abandonner l’affaire. Devant la Cour, les requérantes soutenaient que les autorités autrichiennes avaient omis de mener une enquête effective et exhaustive. Elles affirmaient que les évènements survenus en Autriche ne pouvaient pas être considérés comme isolés et que les autorités autrichiennes avaient l’obligation, en vertu du droit international, d’examiner également les évènements produits à l’étranger. S’agissant de la violation alléguée de l’article 4 de la Convention, la Cour observe que les autorités autrichiennes n’avaient aucune obligation d’élargir leur enquête aux infractions commises à l’étranger. Par ailleurs, la Cour note que, concernant les évènements survenus à Vienne, les autorités ont suffisamment enquêté sur les allégations des requérantes et ont pris toutes les mesures nécessaires que l’on pouvait attendre d’elles pour faire face à cette situation. En effet, les requérantes ont été interrogées par des officiers de police expérimentés et ont obtenu une résidence et des visas de travail pour régulariser leur séjour en Autriche. En outre, leurs données personnelles ont été dissimulées pour assurer leur protection. La Cour relève qu’aucune initiative supplémentaire de la police autrichienne ne pouvait avoir de chance raisonnable de succès en raison, d’une part, de l’absence d’accord entre l’Autriche et les Emirats Arabes Unis et, d’autre part, du fait que les requérantes se sont présentées devant la police autrichienne environ un an après les évènements en question, alors que leurs employeurs avaient depuis longtemps quitté le pays. Partant, la Cour conclut à la non-violation de l’article 4 de la Convention. S’agissant de la violation alléguée de l’article 3 de la Convention, la Cour conclut, pour les mêmes motifs, à sa non-violation. (DT)