France / Pouvoir de sanction de l’Autorité des marchés financiers / Droit à un procès équitable / Principe de légalité des délits et des peines / Non-violation / Arrêt de la CEDH (Leb 779)

Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 1er septembre dernier, les articles 6 §1 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit à un procès équitable et au principe de légalité des délits et des peines (X et Y c. France, requête n°48158/11). Les requérants, ressortissants français, travaillant pour une banque, ont été sanctionnés par l’Autorité des marchés financiers (« AMF ») du fait du non-respect des règles et du délai de couverture de ventes d’actions à découvert à l’occasion d’une opération d’augmentation de capital d’une société. Les requérants reprochaient à l’AMF de ne pas avoir satisfait à l’exigence d’impartialité et de les avoir sanctionnés sur la base de dispositions ne répondant pas aux exigences d’accessibilité et de prévisibilité, en ce que le comportement sanctionné ne constituait pas un manquement expresse au Code des marchés financiers, emportant ainsi violation des articles 6 §1 et 7 de la Convention. S’agissant de l’article 6 §1 de la Convention, la Cour note que rien, en l’espèce, n’est de nature à remettre en cause l’aspect subjectif de l’impartialité. Eu égard au caractère objectif de l’impartialité, elle constate que les dispositions du droit interne régissant l’organisation et la procédure de sanction au sein de l’AMF opèrent une séparation claire et étanche entre les organes de contrôle, d’enquête et de poursuite, d’une part, et l’organe de jugement, d’autre part. Elle considère, dès lors, qu’il n’y a pas lieu de douter de l’indépendance de la Commission des sanctions de l’AMF et conclut à la non-violation de l’article 6 §1 de la Convention. S’agissant de la violation alléguée de l’article 7 de la Convention, la Cour rappelle que, aussi clair que le libellé d’une disposition légale puisse être, y compris une disposition de droit pénal, il existe inévitablement un élément d’interprétation judiciaire. Or, l’article 7 de la Convention ne peut empêcher la clarification des règles de responsabilité pénale par l’interprétation judiciaire, à condition que le résultat soit cohérent avec la substance de l’infraction et raisonnablement prévisible. Par ailleurs, elle rappelle que la notion de « prévisibilité » dépend, dans une large mesure, du contenu du texte, du domaine qu’il couvre et de la qualité des destinataires. La Cour note que la question de l’articulation des textes en cause pouvait constituer une difficulté certaine d’interprétation, mais estime que la Commission des sanctions n’était pas pour autant dans l’incapacité de qualifier juridiquement les fautes commises par les requérants. La Cour rappelle à ce sujet que le caractère inédit d’une question juridique posée ne constitue pas en soi une atteinte aux exigences d’accessibilité et de prévisibilité de la loi, dès lors que la solution retenue fait partie des interprétations possibles et raisonnablement prévisibles. Partant, elle conclut à la non-violation de l’article 7 de la Convention. (JL)

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