Saisie d’une requête dirigée contre la Suisse, la Cour européenne des droits de l’homme a, notamment, interprété le 22 décembre 2015, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit au respect de la vie privée et familiale (G.S.B c. Suisse, requête n°28601/11). Le requérant, ressortissant saoudien et américain, a vu ses données bancaires transmises par une banque suisse à l’administration fiscale américaine, en application d’une convention d’entraide administrative entre la Suisse et les Etats-Unis. Il alléguait que la divulgation de ses données bancaires constituait une violation de son droit au respect de sa vie privée et familiale. La Cour constate, tout d’abord, que le requérant a été victime d’une ingérence dans son droit au respect de sa vie privée lorsque ses données bancaires ont été transmises aux autorités fiscales américaines. S’agissant de la base légale de l’ingérence, la Cour estime que la mesure litigieuse a été négociée et conclue par le Conseil fédéral suisse, approuvée par le parlement fédéral puis ratifiée par le gouvernement, selon la procédure de conclusion des traités prévue par le droit constitutionnel. Elle ajoute, s’agissant du caractère prévisible tenant à l’application rétroactive de la convention, que le requérant ne peut prétendre que la pratique auparavant restrictive des autorités suisses en matière d’entraide administrative fiscale avait pu créer, dans son chef, l’attente de pouvoir continuer à placer des avoirs en Suisse en restant à l’abri de tout contrôle de la part des autorités américaines compétentes. S’agissant de l’existence d’objectifs légitimes, la Cour admet que la mesure incriminée poursuit un but légitime puisqu’elle pouvait valablement être considérée comme de nature à contribuer à la protection du bien-être économique du pays. S’agissant du caractère nécessaire de la mesure dans une société démocratique, elle estime, notamment, que dans le cas d’espèce, seules les données bancaires du requérant sont concernées, soit des informations purement financières et non des données intimes ou liées étroitement à son identité qui auraient mérité une protection accrue. Dès lors, elle considère que la marge d’appréciation de la Suisse était ample. En outre, la Cour précise que le requérant a bénéficié de certaines garanties effectives et réelles d’ordre procédural pour contester la remise de ses données bancaires et, dès lors, se protéger contre une mise en œuvre arbitraire des accords conclus entre la Suisse et les Etats Unis. Partant, elle conclut à la non-violation de l’article 8 de la Convention. (AB)