Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 3 décembre dernier, l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit à la liberté d’expression (Prompt c. France, requête n°30936/12). Le requérant, ressortissant français, était l’avocat de l’un des protagonistes dans l’affaire de l’assassinat de Grégory Villemin, dont les circonstances ne sont pas encore élucidées à ce jour. Celui-ci a publié un livre sur cette affaire. Les parents de l’enfant assassiné ont alors fait assigner le requérant en diffamation pour 28 passages du livre. Condamné pour certains des passages, le requérant se plaignait d’une atteinte à sa liberté d’expression protégé par l’article 10 de la Convention. La Cour constate, tout d’abord, que la condamnation du requérant constitue une restriction à l’exercice de sa liberté d’expression. Elle précise, ensuite, qu’elle était prévue par la loi et poursuivait le but légitime de la protection de la réputation ou des droits d’autrui, prévue à l’article 10 §2 de la Convention. La Cour relève, par ailleurs, que le requérant s’exprimait sur un sujet relevant de l’intérêt général et que plusieurs éléments montrent que les juridictions internes ont examiné avec minutie la cause du requérant et ont dûment mis en balance les intérêts en présence. Ainsi, le jugement du tribunal de première instance contient un résumé détaillé de l’ouvrage et, à l’issue de leur examen, les juridictions internes n’ont retenu la diffamation que pour 2 passages du livre à raison d’éléments qui caractérisaient un manque de prudence. Enfin, la Cour souligne que le requérant n’a pas été condamné à une sanction pénale, mais uniquement au paiement d’une amende. Dès lors, la Cour estime que, nonobstant le caractère restreint de la marge d’appréciation dont il disposait, le juge interne pouvait tenir l’ingérence litigieuse dans l’exercice par le requérant de son droit à la liberté d’expression pour nécessaire, dans une société démocratique, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui. Partant, elle conclut à la non-violation de l’article 10 de la Convention. (MF)