Saisie d’une requête dirigée contre la Belgique, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 17 novembre dernier, les articles 3 et 13 de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, à l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants et au droit à un recours effectif (Bamouhammad c. Belgique, requête n°47687/13). Le requérant, ressortissant français résidant en Belgique, a été condamné en Belgique, à plusieurs reprises, notamment pour assassinat, vol avec violence et prise d’otage. Il a fait l’objet d’un régime carcéral particulièrement strict depuis de nombreuses années : 43 transferts de prisons subis sur 6 ans, mise à l’isolement pendant 7 ans, mesures de coercition et prolongation systématique des mesures de sécurité d’exception. Invoquant l’article 3 de la Convention, le requérant alléguait avoir été soumis en prison à des traitements inhumains et dégradants dont il a résulté une détérioration de son état de santé mentale. Il se plaignait, également, de ne pas avoir bénéficié d’un recours effectif devant les instances nationales conforme à l’article 13 de la Convention. S’agissant de l’article 3 de la Convention, la Cour relève n’être pas convaincue qu’un juste équilibre ait été ménagé par les autorités pénitentiaires entre les impératifs de sécurité et l’exigence d’assurer au requérant des conditions humaines de détention. En outre, elle observe que malgré les constats des professionnels qui, au contact direct avec la réalité de la détention du requérant, considéraient de manière récurrente que l’incarcération ne remplissait plus ses objectifs légitimes et qui étaient favorables à la mise en place d’alternatives, les autorités pénitentiaires ont persisté dans leur refus de faire évoluer la situation du requérant sous forme de permissions de sortie et de congés pénitentiaires malgré la dégradation de son état de santé. La Cour estime que les modalités d’exécution de la détention du requérant ont pu provoquer chez lui une détresse qui a excédé le niveau inévitable de souffrance inhérent à la détention et que le seuil de gravité pour qu’un traitement soit considéré, au sens de l’article 3 de la Convention, comme dégradant a ainsi été dépassé. Partant, elle conclut à la violation de l’article 3 de la Convention. Concernant l’article 13 de la Convention, la Cour remarque qu’en raison des transferts répétés, la protection offerte par le juge en référé en Belgique ne s’est pas avérée efficace. En effet, en raison desdits transferts, les procédures introduites par le requérant n’ont pu aboutir. Partant, la Cour conclut à la violation de l’article 13 combiné avec l’article 3 de la Convention. (AB)