Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 10 novembre dernier, les articles 10 et 17 de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit à la liberté d’expression et à l’abus de droit (Dieudonné M’Bala M’Bala c. France, requête n°25239/13). Le requérant, ressortissant français, a organisé un spectacle lors duquel il a invité sur scène un universitaire condamné à plusieurs reprises pour des propos négationnistes. Il lui a alors fait remettre une récompense au cours d’une séquence comprenant plusieurs provocations. A la suite de ce spectacle, il a été condamné pour injure publique. Invoquant notamment l’article 10 de la Convention, le requérant estimait que sa condamnation avait porté atteinte à son droit à la liberté d’expression. La Cour rappelle, tout d’abord, que les propos dirigés contre les valeurs qui sous-tendent la Convention se voient soustraits par l’article 17 à la protection de l’article 10 de la Convention. En l’espèce, elle observe que le requérant a été condamné par les juridictions internes pour injure publique sur une appréciation des faits qu’elle partage. Elle précise, en particulier, qu’elle n’a aucun doute quant à la teneur fortement antisémite du passage litigieux du spectacle du requérant. Elle considère, ainsi, qu’au cours de ce passage la soirée a perdu son caractère de spectacle de divertissement pour devenir un meeting. Elle précise, en outre, que le requérant tente de détourner l’article 10 de la Convention de sa vocation en utilisant son droit à la liberté d’expression à des fins contraires au texte et à l’esprit de la Convention qui, si elles étaient admises, contribueraient à la destruction des droits et libertés garantis par la Convention. Partant, elle considère qu’en vertu de l’article 17 de la Convention, le requérant ne peut bénéficier de la protection de l’article 10 et déclare la requête irrecevable. (KO)