Saisie d’un pourvoi introduit par la Commission européenne demandant l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 décembre 2009 (EDF / Commission, aff. T-156/04), la Cour de justice de l’Union européenne a appliqué, le 5 juin dernier, le critère de l’investisseur privé avisé dans une économie de marché (Commission / EDF, aff. C-124/10). Le Tribunal avait annulé partiellement la décision de la Commission au terme de laquelle l’exonération fiscale accordée par l’Etat français à EDF, durant l’opération de restructuration de son bilan et d’augmentation de son capital à la suite de l’ouverture du marché de l’électricité, avait été qualifiée d’aide d’Etat incompatible avec le marché commun. La Cour s’est prononcée sur la question de savoir si un Etat membre, qui est à la fois créancier fiscal d’une entreprise publique et son unique actionnaire, peut invoquer l’application du critère de l’investisseur privé lorsqu’il réalise une augmentation de capital de cette entreprise en renonçant à cette créance fiscale ou s’il y a lieu d’écarter ce critère, comme l’a fait la Commission en l’espèce, eu égard à la nature fiscale de la créance et au fait que l’Etat fait usage de ses prérogatives de puissance publique en renonçant à cette créance. La Cour rappelle que les conditions que doit remplir une mesure pour relever de la notion d’aide d’Etat ne sont pas satisfaites si une entreprise publique bénéficiaire pouvait obtenir le même avantage que celui qui a été mis à sa disposition au moyen de ressources d’Etat dans des circonstances qui correspondent aux conditions normales du marché, cette appréciation s’effectuant, pour les entreprises publiques, par application du critère de l’investisseur privé. L’applicabilité de ce critère dépend de ce que l’Etat membre concerné accorde en sa qualité d’actionnaire, et non pas en sa qualité de puissance publique, un avantage économique à une entreprise lui appartenant. Le critère est applicable en matière fiscale dans la mesure où la situation financière de l’entreprise publique bénéficiaire dépend non pas de la forme de la mise à disposition de cet avantage, quelle qu’en soit la nature, mais du montant dont elle bénéficie en définitive. En outre, sont seuls pertinents pour en apprécier l’application les éléments disponibles et les évolutions prévisibles au moment où la décision de procéder à l’investissement a été prise. La Cour confirme, ainsi, l’analyse du Tribunal et rejette le pourvoi. (FC)