Saisie d’une requête dirigée contre l’Italie, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a, notamment, interprété, le 27 août dernier, l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit au respect de la vie privée et familiale (Parrillo c. Italie, requête n°46470/11). La requérante et son compagnon, ressortissants italiens, se sont soumis à un traitement de fécondation in vitro et ont obtenu 5 embryons qui ont été conservés. A la suite du décès de son compagnon, la requérante a renoncé à engager une grossesse et à souhaiter faire don des embryons obtenus afin d’aider la recherche scientifique. Toutefois, peu après ce décès, la législation italienne a interdit les expériences sur les embryons humains, même à des fins de recherche scientifique. La requérante soutenait que cette interdiction constituait une violation de son droit au respect de sa vie privée. La Cour constate, tout d’abord, que les embryons issus d’une fécondation in vitro renferment le patrimoine génétique de la personne et représentent, à ce titre, une partie constitutive de l’identité de cette dernière. Ainsi, elle estime que l’article 8 de la Convention est applicable en l’espèce puisque la possibilité pour la requérante de choisir quel sort réserver à ses embryons touche un aspect intime de sa vie personnelle et relève donc de son droit à l’autodétermination. La Cour admet, ensuite, que l’objectif, poursuivi par l’interdiction litigieuse, de protéger la potentialité de vie dont l’embryon est porteur peut être rattaché au but légitime de protection de la morale et des droits et libertés d’autrui. Toutefois, elle précise que cela n’implique aucun jugement de la Cour sur le point de savoir si le mot « autrui » englobe l’embryon humain. De plus, elle considère que le droit de donner des embryons à la recherche scientifique ne fait pas partie du noyau dur des droits protégés par l’article 8 de la Convention puisqu’il ne porte pas sur un aspect particulièrement important de l’existence et de l’identité de l’intéressé. A cet égard, la Cour relève que l’Italie doit bénéficier d’une large marge d’appréciation en l’espèce, qui est confirmée, notamment, par l’absence de consensus européen sur la question. Or, elle observe que le législateur italien a tenu compte des différents intérêts en présence, notamment celui de l’Etat à protéger l’embryon et celui des individus à exercer leur droit à l’autodétermination. Par ailleurs, elle constate que rien n’atteste de la volonté du compagnon décédé de donner les embryons à la science, au moment de la fécondation in vitro, alors qu’il était concerné au même titre que la requérante. Dès lors, la Cour estime que l’Italie n’a pas outrepassé la marge d’appréciation dont elle jouit en la matière et que l’interdiction litigieuse était nécessaire dans une société démocratique. Partant, elle conclut à la non-violation de l’article 8 de la Convention. (MS)