Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Bundesgerichthof (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 16 juillet dernier, l’article 8 §3, sous e), de la directive 2004/48/CE relative au respect des droits de propriété intellectuelle, lequel concerne la divulgation d’informations sur l’origine et les réseaux de distribution de marchandises contrefaites (Coty Germany, aff. C-580/13). Dans l’affaire au principal, une société de fabrication et de distribution de parfums, victime de distribution de produits de contrefaçon, a demandé à une banque le nom et l’adresse du titulaire du compte bancaire du bénéficiaire d’une transaction frauduleuse impliquant l’achat de produits de contrefaçon. La banque a refusé de lui donner ces informations en invoquant le secret bancaire, comme le droit allemand le lui autorisait. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si l’article 8 §3, sous e), de la directive doit être interprété comme s’opposant à la possibilité d’invoquer le secret bancaire pour rejeter une demande de révélation des nom et adresse du titulaire d’un compte soupçonné d’activités contrefaisantes. La Cour observe que l’interprétation de la disposition de la directive doit respecter tant le droit à l’information que le droit à la protection des données à caractère personnel. Elle rappelle que les Etats membres sont tenus, lorsqu’ils mettent en œuvre une directive, de ne pas se fonder sur une interprétation de celle-ci qui entrerait en conflit avec les droits fondamentaux. Elle observe que la disposition nationale permet d’invoquer le secret bancaire de manière illimitée, dès lors que son libellé ne contient ni condition ni précision. Constatant qu’une telle règlementation est susceptible de porter atteinte à l’exercice effectif du droit fondamental de propriété intellectuelle et au droit à un recours effectif, la Cour affirme que celle-ci ne respecte pas l’exigence d’assurer un juste équilibre entre les différents droits fondamentaux mis en balance à l’article 8 de la directive. Partant, elle conclut que celui-ci s’oppose à une disposition nationale autorisant de manière inconditionnelle d’exciper du secret bancaire. (JL)