Saisie d’une requête dirigée contre la France, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 9 juillet dernier, l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif à l’interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants (R.K. c. France, requête n°61264/11). Le requérant, un ressortissant russe, était soupçonné d’avoir apporté, lorsqu’il vivait à Grozny, un soutien à des personnes suspectées par les autorités russes d’avoir participé à de nombreux attentats en Tchétchénie. Après avoir été arrêté et interrogé violemment par la police sur ces activités, il a sollicité l’asile en France. Ses demandes ayant été refusées plusieurs fois par les autorités françaises, un arrêté de reconduite à la frontière fixant la Russie comme pays de renvoi lui a été notifié. Saisie dans ce contexte, la Cour a décidé, en vertu de l’article 39 de son règlement sur les mesures provisoires, d’indiquer au gouvernement français de ne pas renvoyer le requérant vers la Russie pour la durée de la procédure devant elle. Le requérant alléguait qu’un renvoi vers la Russie l’exposerait à être soumis à des traitements contraires à l’article 3 de la Convention. La Cour constate que bien que soient rapportées de graves violations des droits de l’homme en Tchétchénie, la situation n’est pas telle que tout renvoi en Russie constituerait une violation de l’article 3 de la Convention. Cependant, elle rappelle que l’appréciation du risque pour le requérant doit se faire sur une base individuelle et que certaines personnes, notamment toute personne ayant un lien avec les membres de la lutte armée de résistance tchétchène, sont plus susceptibles que les autres d’attirer l’attention défavorable des autorités. La Cour estime ainsi qu’il existe, dans les circonstances particulières de l’espèce, un risque réel pour le requérant. Partant, elle conclut que dans l’éventualité de la mise à exécution de la décision de renvoi vers la Russie, il y aurait violation de l’article 3 de la Convention. (MVW)