Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Verwaltungsgerichtshof Baden‑Württemberg (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a, notamment, interprété le 24 juin dernier, l’article 24 §1 de la directive 2004/83/CE concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts (T., aff. C-373/13). Dans le litige au principal, le requérant, ressortissant turc d’origine kurde, a été reconnu comme réfugié, en Allemagne, en raison, notamment, des activités politiques qu’il a menées en exil en faveur du parti des travailleurs du Kurdistan (« PKK »). Il y a, en outre, acquis un titre de séjour à durée illimitée. Cependant, à la suite de la modification de la situation politique en Turquie, les autorités compétentes ont révoqué son statut de réfugié. Son expulsion a été ordonnée pour des raisons impérieuses liées à la sécurité nationale et à l’ordre public. Saisie dans ce contexte, la juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir, d’une part, si et dans quelle condition l’article 24 §1 de la directive autorise un Etat membre à révoquer le titre de séjour d’un réfugié, ou à mettre fin à ce titre de séjour, alors que cette disposition ne prévoit pas explicitement cette possibilité et, d’autre part, si le soutien apporté par un réfugié à une association terroriste peut constituer une des « raisons impérieuses liées à la sécurité nationale ou à l’ordre public » au sens de l’article 24 §1 de la directive. S’agissant de la première question, la Cour considère que malgré l’absence de disposition expresse autorisant les Etats membres à révoquer un titre de séjour précédemment délivré à un réfugié, plusieurs arguments militent en faveur d’une interprétation permettant aux Etats membres de recourir à une telle mesure. En particulier, le libellé de l’article 24 de la directive n’exclut pas expressément cette possibilité et la révocation d’un titre de séjour apparait conforme à la finalité de cette disposition. Dès lors, la Cour considère que les Etats membres peuvent révoquer un titre de séjour octroyé à un réfugié ou mettre fin à ce titre sur la base de l’article 24 §1 de la directive à condition que des raisons impérieuses liées à la sécurité nationale ou à l’ordre public justifient une telle mesure. S’agissant de la deuxième question, la Cour considère que les notions de « sécurité nationale » et d’« ordre public » couvrent les cas dans lesquels un ressortissant d’un pays tiers appartient à une association qui soutient le terrorisme international ou soutient une telle association. La Cour ajoute, cependant, qu’il reviendra à la juridiction nationale de vérifier si les actes de l’organisation en question peuvent menacer la « sécurité nationale » ou l’« ordre public » au sens de la directive. Elle indique, enfin, que le réfugié dont le titre de séjour est révoqué en application de l’article 24 §1 de la directive conserve son statut de réfugié, à moins et jusqu’à ce qu’il soit mis fin à ce statut. Dès lors, même privé de titre de séjour, l’intéressé demeure réfugié et conserve le droit aux avantages que la directive garantit à tout réfugié. (AB)