Saisie d’une requête dirigée contre le Luxembourg, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 9 avril dernier, l’article 6 §1 combiné avec l’article 6 §3, sous c), de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit à un procès équitable et au droit à l’assistance d’un avocat (A.T. c. Luxembourg, requête n°30460/13). Le requérant, ressortissant britannique, a fait l’objet de poursuites pénales au Luxembourg. Sur la base d’un mandat d’arrêt européen, il a été remis aux autorités luxembourgeoises et, dès son arrivée, a été immédiatement auditionné par la police judiciaire. Lors de cette audition, il a refusé de faire la moindre déclaration et a réclamé son droit à l’assistance d’un avocat avant de consentir à un interrogatoire en l’absence de ce dernier, conformément à la procédure pénale en vigueur. Le lendemain, il a été présenté au juge d’instruction. Lors de cet interrogatoire, il s’est vu notifier le droit à l’assistance d’un avocat et un avocat commis d’office a été nommé. Le requérant alléguait une violation de l’article 6 de la Convention en ce que le droit luxembourgeois ne garantissait pas, à l’époque des faits, le droit à l’assistance d’un avocat dans le cadre d’un mandat d’arrêt européen. Par ailleurs, il soutenait que le défaut d’accès au dossier par l’avocat avant la première comparution devant le juge d’instruction et l’absence de communication entre l’avocat et son client avant et pendant cette comparution étaient contraires à l’article 6 de la Convention. S’agissant de l’absence d’assistance d’un avocat lors de l’audition policière, la Cour constate, qu’à l’époque des faits, l’assistance d’un avocat était explicitement prévue par la loi dans certaines hypothèses, mais implicitement exclue dans d’autres et, notamment, dans le cadre de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen émis par le Luxembourg. Rappelant sa jurisprudence sur l’importance du droit d’accès à un avocat dès le début d’une mesure privative de liberté, la Cour constate que l’absence de l’avocat emporte violation de l’article 6 §1 de la Convention combiné avec l’article 6 §3, sous c), de la Convention. S’agissant, ensuite, du défaut d’accès au dossier par l’avocat, elle estime que l’article 6 de la Convention ne doit pas être interprété comme garantissant un accès illimité au dossier pénal avant le premier interrogatoire par le juge d’instruction, lorsque les autorités nationales disposent de raisons relatives à la protection des intérêts de la justice suffisantes pour ne pas mettre en échec l’efficacité des investigations. Toutefois, le droit national doit assurer un juste équilibre permettant à la personne interrogée de disposer de toute liberté d’organiser sa défense, y compris le droit de garder le silence, de consulter le dossier après le premier interrogatoire devant le juge d’instruction et de choisir sa stratégie de défense tout au long du procès pénal. Constatant que cet équilibre est respecté, la Cour conclut à la non violation de l’article 6 de la Convention. Concernant, enfin, l’absence de communication entre le requérant et son avocat avant et pendant l’interrogatoire de première comparution, la Cour relève l’importance d’une consultation entre l’avocat et son client à ce stade de la procédure. Elle affirme que ce droit doit être consacré explicitement par la législation. L’absence d’une telle consécration constitue, en soi, une violation du droit à l’assistance d’un avocat. Partant, la Cour conclut à la violation de l’article 6 §3, sous c), de la Convention, combiné avec l’article 6 §1 de la Convention. (JL)