Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Conseil d’Etat (France), la Cour de justice a interprété, le 26 février dernier, l’article 4 du règlement 1408/71/CE relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non-salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, lequel définit le champ d’application matériel du règlement (De Ruyter, aff. C-623/13). Dans le litige au principal, un ressortissant néerlandais, domicilié en France et employé par une société néerlandaise, a déclaré en France des revenus de source néerlandaise, composés, notamment, de salaires et de rentes viagères à titre onéreux. L’administration fiscale française l’a assujetti à des cotisations sociales à raison des rentes. Le requérant a ainsi cotisé, à raison des mêmes revenus, à 2 régimes de sécurité sociale distincts. Il soutenait que cette double cotisation était contraire au principe de l’unicité de la législation sociale applicable prévue par le règlement. La juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si des prélèvements sur les revenus du patrimoine relèvent du champ d’application du règlement, quand bien même ils ne proviennent pas de l’exercice d’une activité professionnelle. La Cour rappelle, tout d’abord, que le champ d’application du règlement est déterminé par l’existence d’un lien direct et suffisamment pertinent que doit présenter la disposition en cause avec les lois qui régissent les branches de sécurité sociale. Elle constate, ensuite, que les prélèvements en cause, assis sur le patrimoine du requérant, sont affectés directement et spécifiquement au financement de certaines branches de sécurité sociale en France. Elle estime donc qu’ils présentent un lien direct et suffisamment pertinent avec les branches de sécurité sociale énumérées à l’article 4 du règlement. En outre, la Cour souligne que l’objectif du règlement est d’assurer la libre circulation des travailleurs dans l’Union et l’égalité de traitement de ceux-ci au regard des différentes législations nationales. A cet égard, elle considère que le fait d’assujettir le résident d’un Etat membre, affilié à la sécurité sociale d’un autre Etat membre, à des cotisations sociales dans l’Etat de résidence crée une inégalité de traitement vis-à-vis des résidents de l’Etat membre qui ne sont tenus de cotiser qu’au régime de sécurité sociale de celui-ci. Ainsi, l’application du règlement ne saurait être limitée aux seuls revenus que les personnes assujetties aux cotisations sociales nationales tirent de l’exercice d’une activité professionnelle. Partant, la Cour conclut que les revenus du patrimoine présentent bien un lien direct et pertinent avec certaines branches de sécurité sociale énumérées à l’article 4 du règlement. (DH)