Saisie d’une requête dirigée contre la Hongrie, la Cour européenne des droits de l’homme a interprété, le 27 janvier dernier, les articles 6 et 10 de la Convention européenne des droits de l’homme relatifs, respectivement, au droit à un procès équitable et à la liberté d’expression (Kincses c. Hongrie, requête n°66232/10 – disponible uniquement en anglais). Dans l’affaire au principal, le requérant, avocat hongrois, représentait une association de chasseurs dans un procès au civil. Il a demandé que l’un des magistrats siégeant soit récusé, arguant que celui-ci était professionnellement incompétent et détestait personnellement la défenderesse à l’action. A la suite de cet incident, une procédure disciplinaire a été ouverte contre le requérant qui a été condamné par la commission disciplinaire du Barreau à payer une amende pour atteinte à la dignité de la magistrature. Invoquant l’article 10 de la Convention, le requérant alléguait que son droit à la liberté d’expression dans l’exercice de sa profession d’avocat avait été violé, en ce qu’il a été condamné à une sanction disciplinaire. En outre, il soulevait, également, une violation de son droit à un procès équitable eu égard à la longueur de la procédure judiciaire de contestation de cette sanction qui avait duré 7 ans. La Cour rappelle, tout d’abord, s’agissant de l’article 10 de la Convention, que la liberté d’expression ne s’applique pas uniquement aux informations ou idées qui sont favorablement accueillies par l’opinion publique ou considérées comme inoffensives, mais également à celles qui peuvent déranger ou choquer. Elle considère, cependant, que la critique doit être distinguée de l’insulte et que la conduite de l’avocat, qui tient une position centrale dans l’administration de la justice, doit être exemplaire au regard des règles déontologiques de la profession. En effet, pour que le public ait confiance en l’administration de la justice, il doit croire en la capacité de l’avocat à assurer de manière effective la mission de représentation qui lui incombe. S’agissant de l’article 6 de la Convention, la Cour estime que la longueur des procédures était excessive au regard du critère du délai raisonnable. Partant, elle conclut qu’il n’y a pas eu violation de l’article 10 de la Convention, mais qu’il y a bien eu violation de l’article 6 de la Convention. (DH)