Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Bundespatentgericht (Allemagne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 10 juillet dernier, les articles 2 et 3 de la directive 2008/95/CE rapprochant les législations des Etats membres sur les marques relatifs, respectivement, à la définition des signes pouvant constituer des marques et aux motifs de refus ou de nullité (Apple Inc., aff. C‑421/13). Le litige au principal opposait le requérant, la société Apple, à l’Office allemand des brevets et des marques, au sujet du rejet par ce dernier d’une demande d’enregistrement de marque. Cette marque tridimensionnelle consistant en la représentation, par un dessin multicolore, de ses magasins « porte-drapeaux », avait été enregistrée par Apple aux Etats-Unis, depuis 2010. La juridiction de renvoi a interrogé la Cour sur le point de savoir si les articles 2 et 3 de la directive doivent être interprétés en ce sens que la représentation, par un simple dessin sans indication de taille ni de proportions, de l’aménagement d’un espace de vente peut être enregistrée comme marque pour des services qui consistent en diverses prestations visant à amener le consommateur à acheter les produits de l’auteur de la demande d’enregistrement et si, dans l’affirmative, une telle « présentation matérialisant un service » peut être assimilée à un « conditionnement ». La Cour considère, tout d’abord, que pour être susceptible de constituer une marque, l’objet de la demande d’enregistrement doit, en vertu de la directive, remplir 3 conditions, à savoir qu’il doit constituer un signe, être susceptible d’une représentation graphique et être propre à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises. La Cour estime, à cet égard, qu’une représentation comme celle en l’espèce peut, sous ces conditions, constituer une marque. Par conséquent, la Cour considère qu’une telle représentation satisfait aux première et deuxième conditions sans qu’il soit besoin de conférer une pertinence au fait que le dessin est dépourvu d’indications concernant la taille et les proportions de l’espace de vente qu’il visualise ni d’examiner si un tel dessin peut également, en tant que « présentation matérialisant un service », être assimilé à un « conditionnement » au sens de l’article 2 de la directive. La Cour souligne, cependant, que l’aptitude générale d’un signe à constituer une marque n’implique pas que ce signe possède nécessairement un caractère distinctif au sens de la directive. Partant, la Cour conclut que, si aucun des motifs de refus d’enregistrement énoncés dans la directive ne s’y oppose, un signe représentant l’aménagement des magasins « porte-drapeaux » d’un fabricant de produits peut valablement être enregistré non seulement pour ces produits, mais également pour des prestations de services, dès lors que ces prestations ne font pas partie intégrante de la mise en vente des produits. (CK)