Saisie d’un renvoi préjudiciel par le Wojewódzki Sąd Administracyjny w Bydgoszczy (Pologne), la Cour de justice de l’Union européenne a interprété, le 10 avril dernier, les articles 63 et 65 TFUE relatifs, respectivement, à la libre circulation des capitaux et à la différence de traitement (Emerging Markets, aff. C-190/12). Dans le litige au principal, le requérant, un fonds d’investissement établi aux Etats-Unis, avait pour activité la prise de participations dans des sociétés polonaises. Celui-ci a demandé à bénéficier de l’exonération fiscale résultant cumulativement de la loi polonaise sur l’impôt sur les sociétés grevant les dividendes des fonds d’investissement et de la convention préventive de la double imposition. L’administration polonaise a rejeté sa demande d’exonération en raison du lieu du siège social du requérant. La juridiction de renvoi a, notamment, interrogé la Cour sur le point de savoir si les articles 63 et 65 TFUE s’opposent à une législation nationale qui exclut du bénéfice de l’exonération fiscale un fonds d’investissement établi dans un Etat tiers percevant des dividendes versés par des sociétés situées dans l’Etat membre concerné. La Cour constate que la législation en cause constitue une restriction à la libre circulation des capitaux. En effet, elle instaure une différence de traitement fiscal entre les dividendes des fonds d’investissement établis sur le territoire national et ceux provenant de fonds établis dans un Etat tiers. La Cour rappelle que lorsqu’il existe une différence de traitement, telle que celle en cause au principal, il faut qu’elle concerne des situations objectivement non comparables ou soit justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général. Elle estime, à cet égard, que s’agissant d’une législation fiscale qui retient comme critère de distinction principal le lieu de résidence des fonds d’investissement et qui, de ce fait, entraîne la perception ou non d’une retenue à la source sur les dividendes versés par des sociétés polonaises, les fonds d’investissement non-résidents se trouvent dans une situation objectivement comparable à ceux dont le siège est situé sur le territoire polonais. Or, la Cour note que la législation en cause ne peut être justifiée ni par la nécessité de garantir l’efficacité des contrôles fiscaux, ni par la nécessité d’assurer la cohérence du système fiscal national, ni par la nécessité de sauvegarder la répartition du pouvoir d’imposition entre les Etats membres. Elle en conclut que les articles 63 et 65 TFUE s’opposent à une législation fiscale qui exclut du bénéfice de l’exonération fiscale les dividendes versés par des sociétés établies sur le territoire national au profit d’un fonds d’investissement situé dans un Etat tiers à condition qu’existe une convention préventive de double imposition permettant de vérifier par les autorités fiscales nationales les renseignements transmis par le fonds d’investissement en cause. (BK)